dimanche, février 26, 2006

Google earth et le monde en direct

Avant de rentrer dans un nouvel espace ("cyberespace" ou "blogosphère"), une petite note sur la notion de territoire, et les moyens de se repérer.Disons qu'il y a deux grandes manières de s'orienter dans un espace.
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1 - La vue de surplomb, qui offre une vision absolue et englobante de l'espace : c'est l'image Icare qui vole au dessus du labyrinthe pour en observer les contours, c’est la vue des cartes routières, où l'on regarde le territoire comme un oiseau, depuis le ciel.
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2 - Il y a une autre manière de s'orienter, comme font les chasseurs qui suivent le gibier à la trace. On redescend au niveau du sol et l'on se repère grâce à la position relative des objets les uns par rapports aux autres. Icare n’est plus au dessus du labyrinthe, il erre dans les galeries.
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Le site "Google Earth" (voir aussi Google Maps) et l'émission "Le monde en direct" illustrent ces deux manières de s'orienter.

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Le site google earth, c'est la vue de surplomb par satellite. L'internaute observe le monde depuis l'espace, au dessus des nuages, et zoome en piqué comme bon lui semble sur un point précis pour observer les maisons, les rues, les gens.

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Au contraire avec l'émission Le monde en direct (world live) diffusée par ex sur LCI, des caméras ont été installées dans les grandes capitales, et retransmettent en direct depusi le plancher des cches (ou presque) quelques secondes de la vie à l'autre bout de la planète.
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Les deux systèmes mettent l'individu en position de spectateur omniscient, sorte de big brother à qui rien n' échappe. Ils satisfont pleinement cette curiosité décrite par Saint Augustin comme "concupiscence des yeux" (Les confessions), le désir de voir non pour apprendre quelque chose, mais simplement pour satisfaire la pulsion de voir. Le système de caméra choisi par LCI est d'ailleurs assez conforme au positionnement de TF1, qui affiche aussi son goût pour les écrans et les moniteurs en arrière plan de JT, en gage du haut degré de technologie et d'efficacité de la surveillance sur l'actualité. Par ce moyen, le spectateur scrute des gens qui vaquent à leur occupations et ignorent qu'ils sont observés. C'est le plaisir d'être Dieu. Plutôt sympa et original comme utilisation de l'image, donc. A ceci près que :
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1- Chez Google, on ne sait plus très bien qui regarde qui. Grâce à des statistiques en temps réel sur les questions posées, les pages visitées, les données renseignées par les internautes, le staff de google est en mesure de collecter une mine d'informations sur le public connecté : c'est lui est observé au moins autant qu'il cherche à voir.
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2- Quant à l'émission "le monde en direct", elle promet beaucoup, mais ne permet pas de voir grand chose en réalité. L'exploitation qui en est faite est très pauvre. Reléguée à une sorte de banal bulletin météo, on nous dit le temps qu'il fait à Pékin (ce qui n'est pas très utile), au lieu de nous renseigner par exemple sur la nature du bâtiment que l'on voit, les restaurants ou les loisirs disponibles sur place. C'est tout le potentiel de l'émission qui est désamorcé. Au spectateur omnipotent devrait correspondre un commentateur omnicompétent, capable de délivrer un petit commentaire sur la vie à l'autre bout du monde. Quelle différence avec le site de Google, où chaque internaute peut modifier et compléter les cartes pour le bénéfice de tous, en y indiquant des restaurants, des maisons à vendre, des sites à visiter, au moyen de petits drapeaux cliquables, élargissant ainsi indéfiniment les potentialités de l'outil vers des usages nouveaux.

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