Dans ce livre - un classique - très stimulant, Kristeller montre combien le système des beaux arts (poésie, sculpture, architecture, peinture, musique) qui paraît aller de soi, est une invention totue récente, du 18è siècle.
.
Dans l'antiquité, et jusqu'au 17è, les beaux arts comme nous les entendons aujourd'hui n'existent pas. Le beau et l'esthétique ne sont même pas des disciplines autonomes. Le beau est rattaché au bien, au bon, par exemple chez Platon. Au Moyen Âge, les arts libéraux intègrent arts et science sans distinction. La Renaissance bataille dur pour faire admettre la peinture au rang des arts libéraux (cf ci dessous, Alberti) alors qu'elle était jusque là considéré comme un vulgaire métier. Ce n'est qu'avec l'émancipation de la science à partir du 17è que les arts et l'esthétique pourront apparaître comme un champ distinct. Baumgarten et Kant sont les premiers à faire de l'esthétique une région à part entière de leur philosophie.
.
Comme ce champ est lui-même en train de se fissurer au 20è, (apparition de nouveaux arts, comme le cinéma, apparition du ready made qui pense la réflexion artistique en dehors et au-delà de la catégorie de l'esthétique...) le récit de sa genèse n'en est que plus stimulant.
.
Ce qui m'intéresse là dedans, c'est aussi qu'on y trouve l'idée que le sytème des beaux arts est un concept d'abord né du public. Les artistes y sont réfractaires, car au regard de la production, les arts n'ont pas grand chose à voir, et il ne vient pas à l'idée d'un artiste comme Goethe de les rassembler. En revanche, ils procurent tous un même plaisir esthétique, et c'est ce plaisir éprouvé par les spectateurs qui justifie leur mise en relation dans un système structuré. On pourrait rapprocher et comparer ce rôle du public pour les arts et ce qu'il a rendu possible pour les sciences, via notamment la réception des journaux savants du 17è, mais c'est l'objet d'un autre travail.
lundi, juin 26, 2006
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire